"Il vaut mieux allumer une petite lumière que de pleurer tout seul dans le noir".

L'objectif de cette Grenouille est d'essayer de contribuer à l'élaboration de propositions pour répondre aux nombreux mails que vous m'avez envoyé et en particulier à la question posée par Didier qui se préoccupe de l'avenir de la photographie et des photographes:
Il y a t-il des solutions rapides et réalistes pour aider les photographes qui souffrent ?
Mais aussi à la question de Xavier:
Que faire avec nos moyens restreints de photographes ?
Ces deux questions résument les 28 mails reçus cette semaine dont certains sont très pessimistes, d'autres naïfs, les plus nombreux exprimant la colère envers "le monde entier".
Faire des propositions impose de faire un
diagnostic, donc de constater ce qui se passe, de comprendre pourquoi ça se passe et en fonction de son éducation, de sa culture, de ses valeurs humaines, de la position que l'on occupe dans la société et de ses propres intérêts, faire enfin une ordonnance, des propositions, visant à soulager la souffrance, non pas par des rustines mais par un traitement de fond pour obtenir la guérison.
En étant convaincu qu'il n'y pas de guérison définitive.
En étant convaincu qu'il n'y a pas de baguette magique.

En étant convaincu aussi que seules les batailles qu'on ne livra pas sont perdues d'avance.


Le diagnostic:
- Les droits d'auteurs se sont écroulés, divisés par 2 en moyenne, voire par 5 dans certains domaines comme le sport. Imaginons que le pain, la viande, le lait et autres denrées aient subi la même dégringolade, la France serait à feu et à sang.
- Les nouveaux distributeurs de photos ont saisi les nouvelles technologies du numérique pour faire sauter la banque et s'approprier les circuits de distribution en cassant les prix et par la même occasion tous ceux qui en vivaient.
- Les amateurs ne sont pas à l'origine du malheur des auteurs photographes. Les responsables sont les diffuseurs qui profitent de la situation pour diminuer les frais photographiques.
- Les Quotidiens de presse écrite, tous en déficit, sont voués à disparaître, remplacés par les sites Internet qui payent les photos au lance pierres, quand ils les payent.
La presse quotidienne est déficitaire depuis longtemps et malgré cela elle persiste car elle est avant tout un outil de com au bénéfice des propriétaires et de leurs amis. (suivez mon regard). Il n'y a que dans la presse où les patrons ne déposent pas le bilan, alors qu'ils perdent de l'argent depuis de nombreuses années. Cela prouve que leur but premier n'est pas de faire de l'info de qualité et de gagner de l'argent mais bien de défendre les intérêts du principal actionnaire, bien souvent fournisseur de l'Etat.
- Les Magazines sont dans une situation contrastée, certains "vivotent", d'autres se portent très bien
notamment les Mag spécialisés.
- Les diffuseurs profitent de la situation, ne respectent pas la loi (CPI) et cela très consciemment et très volontairement. Ils font tout pour payer le moins possible au risque de tuer la production de qualité. "Parlez moi de culture et je sors mon revolver".
- Les auteurs photographes n'ont pas les moyens de faire respecter la loi, par manque de moyens financiers mais aussi par l'incapacité à s'organiser efficacement pour agir collectivement.
Le revenu moyen des auteurs photographes est de 1147 €/mois (source UPC).
Le smic est à 1200€/mois (net).
Comment investir ? -
Les partis politiques sont tout à fait informés de la situation. L'actuel Gouvernement, non seulement ne fait rien mais au contraire accentue le massacre. Les partis d'opposition écoutent sans réagir ni rien proposer.

Donc le constat n'est pas brillant. Aucune autre profession n'est touchée comme celle de photographe. Non seulement l'enjeu est économique mais aussi très politique, ce qui ne facilite pas les choses.
Devant un tel diagnostic, il n'est pas facile de faire une ordonnance.
Pas facile non plus à la mettre en oeuvre.

Le point fondamental est la réévaluation des droits d'auteurs et l'arrêt du vol de ces mêmes droits d'auteur (faux DR).
Pour ce qui est de la photographie, le coupable présumé n'est pas le quidam derrière son ordinateur, mais le diffuseur et le distributeur qui sont derrière leur tiroir-caisse.
Attention, il y en a de tout a fait fréquentables et même défenseurs des photographes.
Mais ils sont rares.
Bien entendu tout le monde sera d'accord avec le “diagnostic” (difficile de voir rouge quand c'est bleu) mais pas obligatoirement avec “l'ordonnance” tout simplement car l'on peut considérer que le métier de photographe est en voie de disparition, qu'il faut être réaliste (chacun met ce qu'il veut derrière ce mot), que l'adversaire est indestructible, donc pas la peine de livrer le combat, donc qu'il faut s'adapter. Sans oublier de qualifier d'archaïques, ceux qui pensent autrement.

"Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles qu'on n'ose pas, c'est parce qu'on n'ose pas qu'elles sont difficiles".
"L'ordonnance" découle d'un choix politique, d'un choix de société, d'un choix personnel. Certains sont heureux avec peu de moyens en regardant pousser les petites fleurs. D'autres ne sont heureux qu'en étant riches et en haut de la pyramide. Ceux-là sont prêts à tout, notamment à affamer les photographes. Bien entendu il y a toutes les variantes imaginables entre les deux conceptions du bonheur. Si on considère que la culture est un antidote à la bestialité de l'homme, on protégera la création artistique, donc les photographes. Il y a ceux qui choisissent consciemment et ceux qui laissent "flotter les rubans" sans se rendre compte que leur indifférence laisse la porte ouverte aux prédateurs.
Les auteurs photographes font tous des compromis en faisant de l'alimentaire ou un second métier.Aujourd'hui pour manger on leur demande d'abandonner leur métier, leur passion, leur création.
Les peintres ont-ils abandonné leur toiles et leurs pinceaux quand la photographie est arrivée ?
NON !
Ceux qui nous demandent de nous adapter n'ont plus d'appareil photo à la main.
Donc je refuse pour ma part de m'adapter.
Je refuse de prendre une caméra.
Je refuse de faire du son.
Je refuse de faire des POM.
Je refuse de produire collectivement.
Je refuse ....
Je veux faire des photos tout seul avec mon appareil, quand je veux, où je veux et comme je veux.
MERDE !
Ça y est, j'en ai mis partout ! :-))

L'ordonnance:
Mes propositions, je ne viens pas de les pondre. Elles ont mûri au fil des Grenouilles, elles ont été enrichies par vos mails, par les discussions que nous avons eues ces derniers mois. Le principe est simple:
Il faut une loi pour faire appliquer la loi.
Rigolez pas, c'est malheureusement le triste constat dans notre République que certaines lois sont appliquées d'une manière draconienne et que d'autres ne le sont pas et que bien entendu ce sont celles qui sont censées protéger le petit et pour ce qui nous concerne , les photographes.
Le Parlement a créé la Loi "Création et Internet". Loi bien mal nommée, elle aurait du s'appeler "Massacre de la création et du droit d'auteur".Le Parlement a donné pouvoir de Justice et de Police à une structure appelée HADOPI (Haute Autorité pour la Diffusion des Oeuvres et la Protection des Droits sur Internet).

Je propose donc que le Parlement créé une structure appelée “
Haute Autorité pour la Création des Oeuvres et la Protection du Droit d'Auteur", (ou donne pouvoir à une structure existante) afin de contraindre les diffuseurs à respecter la loi. A commencer par le site de l'Assemblée Nationale sur lequel nous sommes accueillis par une douzaine de photos non signées, ce que la loi interdit.
C'est très simple, il suffit de remplacer 'Diffusion par Création".
Ce qui a été fait en faveur des diffuseurs doit être fait en faveur des créateurs.

Le principe fondamental:
la Photographie, c'est comme le loyer, l'eau, le gaz, l'électricité, le pain, la viande, les chaussures, ce n'est pas gratuit.
La Photographie doit être rémunérée à son juste prix, sachant qu’il est impossible de chiffrer le cout d’une œuvre originale car ce cout est variable en fonction de son utilisation.
Cela impose donc un barème de base de référence, public, fixant les prix et les critères définissant ces prix.
Le barème de l’UPC est une bonne référence.
Par contre il est indispensable de fixer un prix en dessous duquel il est interdit de descendre, un prix plancher.

A partir de ce principe on peut bâtir des propositions qui visent à sa mise en application.

Chaque photographie doit être signée et rémunérée.
C'est la condition indispensable pour favoriser la création.
C'est la condition indispensable pour que les créateurs puissent vivre.
L'Objectif:
Faire respecter le CPI et notamment le Droit Moral (signature) et Patrimonial (Rémunération).
Fixer un montant minimum de 150 € par photo quel que soit le support et quelle qu'en soit l'origine.
Toute photo diffusée doit être payée par le diffuseur au créateur ou à son mandataire et en cas d’impossibilté à l’HACOPDA.
L'HACOPDA: est chargée de détecter les infractions et de percevoir les rémunérations pour les reverser aux créateurs et enfin de sévir en cas de non respect de la loi. Elle garde un % pour son fonctionnement.
Les droits et les devoirs de l'auteur: L'auteur photographe a obligation d'être déclaré à l'HACOPDA (Il payera une cotisation annuelle) qui lui attribue une signature composée de son Nom et d'un numéro. Cette signature est immuable et obligatoire sur tous les supports. Elle facilitera la détection et la gestion des oeuvres de l'auteur. Un relevé mensuel des scans lui sera donné.
Ex: Daniel Castets 10432127.
L'HACOPDA se dote des logiciels nécessaires pour effectuer la détection des images.
Chaque auteur photographe à en charge la surveillance d'un support papier et d'un site Internet.
Il fera un compte rendu mensuel. Les diffuseurs ont obligation de fournir 2 ou 3 exemplaires de leur production papier à l'HACOPDA qui les attribuera aux photographes.
Il y a actuellement 4700 diffuseurs papiers en France (dont 550 quotidiens, 2500 Mag, 75 Gratuits d'info, 700 Gratuits PA).
Le DR et la photo non signée:
Le DR reste autorisé à condition que le diffuseur verse 150€ par photo à L'HACODA.
Le nombre de photos signées “DR” devra figurer dans l'Ours du support papier ainsi que le site Internet.
La photo non signée est interdite (CPI).
Les sanctions: Le diffuseur contrevenant fera l'objet d'une sanction graduée à savoir: avertissement, lettre recommandée et enfin coupure du réseau Internet s'il s'agit d'un site Internet. Il devra continuer à payer son abonnement et son hébergement.
Pour les supports papiers la sanction suivra le même processus, la sanction finale sera le retrait du N° Paritaire et bien entendu la suppression des subventions qui vont avec.
L'Etat (nos sous) verse chaque année 350 millions d'Euros à la Presse papier.


Enfin, je n'ai pas la prétention de détenir la vérité; mon ambition est d'apporter ma pierre à l'édifice, et il serait bon que ceux qui ont envie de faire avancer le schmilblic prennent leur crayon sans tarder.


Je ne suis pas un doux rêveur, même si parfois après quelques verres de bon vin .....

Je sais, certains vont me dire que je ne suis pas réaliste. Pourtant je ne fais que reprendre ce que le Parlement vient de voter en faveur des diffuseurs.
Là, il s'agit de faire la même chose mais en faveur des auteurs (qu'ils soient photographes ou rédacteurs).
Pourquoi ce qui a été fait pour les uns serait irréaliste pour les autres ?
Il suffit de le décider, ou pour ce qui nous concerne de les obliger de le décider car je ne crois pas aux apparitions.

Rappelons nous que sans les créateurs, les diffuseurs n'existent pas.
Avant de diffuser, il faut créer.

Comment obliger le Parlement à défendre la culture, à défendre les créateurs ?

Beaucoup d'entre vous rabachent que ça va être tellement difficile que ça va être impossible.
"Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles qu'on n'ose pas, c'est parce qu'on n'ose pas qu'elles sont difficiles".
Et hop encore un petit coup, des fois que vous l'auriez oublié
;-)
Tout est possible: Le Gouvernement Américain après avoir nationalisé les banques, vient de nationaliser Général Motors.
Obama se comporte comme un vulgaire communiste.
Il transforme les
United States of América en United Soviets of America.
:-))
Si si, tout est possible, il suffit que les photographes en soient convaincus. Qu'ils soient convaincus de la justesse de ce qu'ils défendent, mais aussi qu'il est possible de gagner.
La première des choses est donc de mettre noir sur blanc ce que nous voulons. Ce n'est pas très compliqué.
La seconde chose est de construire un "plan de bataille", car c'est d'une bataille qu'il s'agit:
- Utiliser Internet pour populariser notre "revendication" auprès des amateurs photographes.
- Faire des “petits coups médiatiques” dans des lieux symboliques ou à l'occasion d'évènements
"intéressants".
- S'adresser aux médias et à leurs photographes salariés.
- Faire des démarches auprès des Parlementaires.
- etc .......
- Préparer les États Généraux par des rencontres Intersyndicales des professions concernées par le CPI.
Il faut savoir ce que l'on veut. Ou on se bouge tous, individuellement et collectivement, ou on bouffe des sardines en silence !